Rencontre avec Derry, sculpteur sur os et bois, qui perpétue les traditions marquisiennes et transmet le mana à travers chaque création.
Rédaction : Maeva LAUTRET
Si tu passes par Tahiti, il y a des rencontres qui marquent. Derry en fait partie. Ce sculpteur et graveur originaire des Marquises manie l’os et le bois avec une précision qui force le respect… mais aussi avec beaucoup de cœur. Ses mains racontent. Elles transmettent. Elles portent en elles ce qu’on appelle ici le mana — cette énergie invisible qui relie les hommes, la terre, les ancêtres et les traditions.
Je suis allé lui rendre visite chez lui, à Titioro.
Un savoir-faire profondément ancré
À Tahiti Et Ses Îles, la sculpture, ce n’est pas juste de l’art : c’est une mémoire vivante. Elle a traversé les âges, sculptée dans le bois, la pierre, l’os ou la nacre. Chaque pièce créée servait un but : communiquer avec les dieux, raconter une légende, signaler un rang social, ou simplement honorer le lien sacré entre l’homme et son environnement.
🪨 Tu savais qu’on sculpte aussi une pierre volcanique très rare ? Elle s’appelle la pierre fleurie (ou phonolite à grenats), qu’on ne trouve qu’à Ua Pou, dans les Marquises, et à quelques endroits très isolés dans le monde. Un vrai trésor minéral.
Mana, symboles et matériaux porteurs d’âme
On ne choisit pas un matériau au hasard.
- Le bois de toa (arbre de fer) symbolise la force.
- L’os porte la mémoire des ancêtres.
- La nacre reflète la lumière du lagon.
- Les dents de cochon ou de requin, la corne, toutes ces matières participent à des bijoux pleins de sens.
Et que dire des motifs gravés ? Spirales, tiki, lignes sacrées… chaque dessin est porteur d’un message, d’un lien au passé, au sacré, à la nature. C’est là que le mana agit.


De l’art sacré aux objets du quotidien
Autrefois, les sculptures ornaient les marae (temples), les pagaies cérémonielles, les armes, les bijoux de rang, les pirogues… Chaque pièce était un support spirituel. Aujourd’hui, cet art se décline aussi dans des objets qu’on peut emporter avec soi : umete, bijoux, tiki, lampes ou décorations murales.
D’ailleurs, lors de ton passage dans les îles — que ce soit à Tahiti, Huahine, Raiatea, Taha’a, Bora Bora ou Maupiti— ne manque pas de passer par un marché ou une expo locale. Tu y découvriras des pièces faites main qui incarnent le vivant de la culture polynésienne.
Transmettre le geste, faire vivre l’histoire
Aujourd’hui encore, cette tradition artistique est bien vivante, grâce à des lieux comme le Centre des Métiers d’Art de Papeete, où de jeunes Polynésiens apprennent à sculpter, graver, peindre, avec les conseils de maîtres artisans.
Des artistes comme Derry redonnent une voix à ces savoir-faire anciens. Ils n’imitent pas, ils réinterprètent avec respect et humilité. Et toujours, dans chacun de leurs gestes, dans la profondeur de leurs pièces, circule cette force qu’on ne voit pas mais qu’on ressent : le mana.
🌐 Explore d’autres savoir-faire polynésiens sur notre site ANOE
🔗 Retrouve ses créations sur Facebook : Créations Keavau